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Cette année, le thème de la célébration de la journée internationale des femmes, s’interroge à raison, sur l’« avenir durable » et l’égalité qu’il est impératif de construire comme moteur de cette durabilité.
Ce rapprochement entre la quête à la durabilité et l’égalité femme-homme, survient dans un contexte international marqué par de graves menaces sur la paix et la sécurité mondiale. En effet, après les ravages socioéconomiques de la pandémie de la Covid-19, le monde entier retient son souffle depuis le 24 février 2022, face à l’escalade de la violence dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine. Cette situation assez exclusive, nous invite à exprimer notre compassion aux victimes innocentes et à manifester notre soutien sans faille, à ces milliers de femmes dans le monde, à l’instar des femmes Russes et Ukrainiennes qui sont et qui seront avec des enfants eux- aussi innocents, quel que soit leur bord, quel que soit leur camp, les victimes collatérales de cet affreux conflit.
Est-il besoin de rappeler que les situations de belligérance comme celle qui oppose la Russie à l’Ukraine en ce début d’année 2022, sont généralement des faits de nature à creuser les inégalités sociales et à saper les avancées importantes réalisées en faveur de l’inclusion sociale ?
Pouvons-nous faire mine d’ignorer en Afrique en général et au Congo en particulier, que les canaux de contagions des crises internationales, quelle que soit leur nature, finissent par impacter voire bouleverser nos fragiles acquis socioéconomiques ?
Cette journée internationale des femmes ce 8 mars 2022, nous offre l’opportunité de réfléchir sur les possibilités réelles, d’exploiter l’égalité des sexes comme moteur de la construction d’un avenir durable, pour nous-mêmes, pour notre pays le Congo ainsi que pour les générations futures.
C’est une invitation à se servir entre autres mécanismes d’impulsion du développement durable, de l’égalité femme-homme comme un outil de résilience de nos Etats, face aux effets des changements climatiques mais aussi surtout, dans le cadre de la prévention et du règlement des conflits par des voies pacifiques. De nombreuses filles de même que de nombreuses femmes sont engagées dans le monde entier et mènent, comme le souligne l’organisation internationale ONU FEMMES dans sa publication du 3 décembre 2021, une véritable offensive sur le front de l’adaptation et de la réponse aux bouleversements climatiques et à leur atténuation. Elles sont toutes aussi mobilisées, il convient de le souligner, dans la politique, la diplomatie, l’économie, les médias, le bénévolat, etc. lorsqu’il s’agit d’exploiter leur sensibilité de mères et de femmes, pour dégager des perspectives nouvelles face aux problèmes qui minent nos sociétés et sauver par ailleurs des vies, durant les conflits.
En République du Congo, le Plan National de Développement (PND) 2022-2026 souligne que la question du genre et de l’autonomisation de la femme demeure encore un défi en termes de participation à la vie politique, sociale, économique. En effet, la représentativité des femmes se présente comme suit : (i) 23% au Gouvernement, (ii) 14% au Parlement, (iii) 19% dans les conseils départementaux et (iv) 24% dans les conseils communaux. Il sied de souligner que les femmes sont représentées à plus de 40% dans les instances des chambres de commerce d’industrie, d’agriculture et des métiers de Brazzaville et de Pointe-Noire.
Dans la même veine, l’enquête sur la représentativité des femmes dans les administrations publiques, parapubliques et privées réalisée par le ministère en charge de la promotion de la femme en 2018 a permis de faire le constat selon lequel la représentativité des femmes restait encore très faible dans les différentes branches d’activités de la vie socioéconomique (Hôtel et restauration, services, Banque et microfinance, etc.).
Dans le domaine de l’emploi, les estimations du BIT 2019 indiquent que le taux de chômage était plus élevé chez les femmes (10,2%) que chez les hommes (9%). L’emploi féminin semble, comme l’ont relevé ces études, se concentrer dans l’agriculture où les femmes jouent un rôle prépondérant et représentent 70% de la main d’œuvre, évoluant majoritairement dans l’informel sans aucune couverture de protection sociale. Ainsi, avec 12,86% de la population nationale que représentent les actifs agricoles, les femmes sont pour une fois, majoritairement représentées dans cette catégorie, avec 65%des dits actifs. Celles-ci cependant continuent d’accéder difficilement à la terre alors que leur production avoisine 70% de la production agricole totale nationale.
Avec ces chiffres, il est très évident de souligner que la diversification de l’économie congolaise, tant recherchée, repose sur une solution toute simple jusque-là pas assez exploitée. Il s’agit d’une part de l’érection du travail des femmes agricoles comme un des piliers de la stratégie de développement de notre pays et d’autre part, de la prise en compte effective de la dimension genre dans toutes les sphères de décision de la vie de nation, en vue de rafraichir et de moderniser l’action publique ainsi que pour enrichir au Congo, les mécanismes de prévention et règlements des différents. Les femmes congolaises ont un grand rôle à jouer sur toutes ces questions !
Ces propositions et orientations nous le constatons, nous permettent d’oser et d’opérer des disruptions profondes dans notre modèle de développement, en faisant l’expérience plus affirmée et assumée, d’une relation de cause à effet entre l’égalité des sexes et la quête d’un avenir durable.
Cette journée internationale du 8 mars 2022, est une véritable opportunité pour nous tous et en particulier pour les institutions nationales et les organisations résidentes, en vue de questionner leurs priorités stratégiques, et rendre si ce n’est déjà fait, plus évident et plus apparent, le lien potentiellement vertueux entre l’égalité femme-homme et le développement durable.
Danièle Sassou Nguesso
Présidente de la Fondation Sounga